Qui aurait cru que Nelliel Wolf perde autant de contrôle en ne faisant que parler d'un garçon ? Hope ne la reconnut pas, et songea un instant qu'elle virait Poufsouffle, la pauvre. Le trouble qu'elle avait en parlant de ce Ren était amusant, mais sur le trajet jusqu'au chariot de friandises, la Levinson réfléchit à ce qu'elle disait. L'amour lui semblait bien étrange. La voilà maintenant avec 15 ans, et dire qu'elle ne commence pas à éprouver certaines envies serait un mensonge. L'adolescence faisant son travail, elle se questionnait elle-même sur un possible petit-ami. Cette idée pourtant l'effrayait. Hope décida qu'elle aiderait Nelliel à être avec son Ren, afin de les observer discrètement et de loin. Peut-être pourra-t-elle ainsi observer les symptômes de cette maladie.

Tout à sa réflexion, les deux nouvelles préfètes se firent bousculer. Interrompues dans leur marche, elles observèrent la gamine qui s'excusa. Son homologue vert et argent, plus pragmatique, l'excusa. La Serdaigle, elle, ne dit rien mais lança un regard à la jeune fille signifiant très clairement : « tu as intérêt à faire plus attention la prochaine fois. »

Elles continuèrent ensuite leur chemin. La vieille dame était là, avec son chariot. Il n'était pas trop tôt. Hope laissa son amie commander. Elle écouta distraitement, mais son attention fut vite reprise lorsqu'elle prit conscience des quantités. Nelliel allait-elle réellement manger tout cela ? Lorsque cette dernière se retourna vers elle, et qu'elle précisa qu'il y en avait aussi pour Ren, Hope sut qu'elle devait avoir un visage très expressif à ce moment. Se reprenant, elle fit un léger sourire ironique. Encore ce Ren, apparemment... Elle doutait sérieusement que ce jeune homme n'ait que cet appétit-là. Elle préféra garder ses pensées pour elle-même, ne souhaitant pas gêner son amie plus qu'elle ne l'est déjà envers son (beau) prétendant.

Après paiement des nombreuses confiseries, ce fut au tour de Hope.

« 3 Chocogrenouilles, 2 Fondants du chaudron, et une sucette parfumée au sang, si vous avez. »

Évidemment, Hope baissa légèrement le ton sur la fin. Elle avouerait volontiers que son péché mignon est le chocolat, mais il était hors de question qu'elle en fasse de même pour les sucettes au sang. Dans sa jeunesse, elle en avait goûté une par inadvertance, et bien que cela lui paraisse bizarre au début, elle avait apprit à apprécier le goût. De toute façon, il ne s'agit pas vraiment de sang, mais seulement de l'imitation du goût. Qu'importe qu'il soit dit "pour les vampires", elle appréciait ceci un point c'est tout. Avec un sourire, la dame lui confirma qu'elle en avait. Satisfaite, Hope ne fit pas de commentaire et regretta presque de ne pas en avoir pris plusieurs. Elle se fit une raison en songeant qu'Honeydukes en vendait aussi. La vendeuse la lui prépara avec ses fondants au chaudron, puis s'arrêta.

« Oh, je suis désolée mon enfant, je n'ai plus de chocogrenouilles. Attend ici, veux-tu, je vais en chercher ?
_ Oh! Non, ce n'est rien, je peux m'en passer... » répondit Hope, trop tard.

Cette idiot était déjà partie. La préfète des Aigles soupira. Hé bien, il n'y avait plus qu'à attendre.

Pendant ce temps-là, Nelliel semblait faire connaissance avec la gamine qui les avait bousculées. Ah, bien, la voilà qui fraternise avec l'ennemi. Ou plutôt une 1^ère année atrocement coincée. Cette pauvre petit n'allait pas à l'asile, tout de même ! Hope se détourna de la conversation, s'appuyant au mur du train. Par là, elle ressentit les moindres secousses de l'engin dans son corps, mais cela ne l'incommoda pas. La jeune fille se prit à imaginer quels gamins elle aurait à s'occuper cette année. Elle ne doutait pas que les nouveaux seront sa priorité. Il y avait, au sein de la maison Serdaigle, peu d'éléments perturbateurs et espéra que cette année ne soit pas l'exception. Obligée d'attendre, Hope imagina quelles sanctions pourrait-elle donner et pour quels motifs, comment aiguiller aux mieux les 1^ère année sans avoir l'air de trop les materner...

Ces réflexions, à vrai dire, allèrent loin. Vint un moment où la jeune fille n'eut plus d'idée. Un comble pour une élève de Rowena ! Elle se redressa. Réalisa que cela commençait à faire long. Cette vieille femme avait-elle fait un détour aux toilettes ou quoi ? Ou peut-être profiterait-elle du moment pour copuler avec un chemineau ? Elle réprima un frisson à cette image mentale, qu'elle chassa bien vite. Pour s'aider, elle écouta discrètement Nelliel et l'autre fille. Elle fut déçue : une discussion banale. Un soupir s'échappa de ses lèvres. Elle fixa le couloir par où était partie cette vendeuse marchant à l'allure d'un ciseburine. Fallait-il donc autant de temps pour quelques malheureuses chocogrenouilles ? Hope songea sarcastiquement qu'elle n'était même pas du genre impatiente : un gryffondor aurait certainement déserté depuis longtemps.

La Levinson posa sa main sur le rebord du chariot. Ses oncles commencèrent à claquer sur celui-ci en une litanie sans fin. La patience est une vertu. La patience est une vertu. La patience est une vertu.

Brusquement, la préfète fit volte-face vers la personne qui venait de parler. L'air agacé, Hope fit claque sa langue et répliqua :

« Vas-y, je t'en prie. De toute façon, cette vieille mégère prend tout son temps. »

Hope pesta encore un peu pour la forme, puis se retourna, montrant son dos à Nelliel qui devait avoir bien compris que sa collègue bleu et bronze n'était pas d'humeur. Ou plutôt, n'était plus d'humeur. Avant d'avoir reçu une réponse, la dame du chariot fit - enfin ! - son entrée dans le wagon. Portant une boîte de chocogrenouilles. Lorsqu'elle s'approcha, Hope ne chercha pas à cacher son mécontentement. Perdre inutilement son temps ainsi lui était insupportable.

« Je suis désolée, ma petite. Je ne trouvais plus la boîte. »

Malgré le doux sourire de la vendeuse, l'élève ne répondit rien. Bien sûr que Hope savait qu'elle était petite, certes ! Mais elle n'appartenait pas à cette mémé ayant trop abusé de bonbons ! Elle décida de garder les lèvres serrées. Mieux valait ne pas commencer à insulter cette imprudente. Afin de s'en convaincre, elle se répéta qu'elle n'en valait tout simplement pas la peine, voilà. Elle paya, la vieille folle ayant la bonne idée de rajouter une sucette au sang gratuite. Contrainte par son éducation, la nouvelle préfète la remercia poliment et fit ses salutations.

« Enfin ! » pensa Hope tandis qu'elle se retournait, voyant Nelliel. La plus petite ne dit rien d'autre qu'un silence oppressant, encore pas mal irritée de cette attente odieuse.